Actus Art

Côte Basque Madame N°40

L'art contemporain

Interview Philippe Shangti

Par Christine Vignau Balency

À 41 ans, Philippe Shangti est un photographe français culte. Ses clichés ne sont ni des collages ni des photomontages. Éblouissants de sens et de détails, sublimant les femmes pour dénoncer la bêtise, la cruauté et les erreurs humaines, ils s’arrachent dans le monde entier. Rencontre avec un artiste fascinant.

Comment définiriez-vous votre art ?

On me considère comme un messager atypique des temps modernes. Par la photographie, je pointe du doigt les fléaux de la société. J’ai débuté ma vie professionnelle à Saint-Tropez, entouré par le gotha international. 

Mes premières photos — dont ma collection No cocaïne here — dénonçaient les abus, le sexe, la drogue. Puis je me suis ouvert sur le monde et j’ai abordé les thèmes de la pollution, du jugement, des sept péchés capitaux, de la maltraitance des animaux.

Qui sont vos sources d’inspiration ?

J’adore les photographies décalées de Guy Bourdin pour Vogue, l’univers fantastique de David LaChapelle et James Bidgood, mais aussi les grands peintres comme Léonard de Vinci, Picasso, Botero ou encore Jérôme Bosch. 

D’ailleurs, ma photographie No animal killer here s’inscrit dans la continuité du chef-d’œuvre de Jérôme Bosch Le Jardin des délices. Sa peinture, remplie de détails et de réflexions, représente pour moi une arche de Noé, un paradis des animaux. J’en ai imaginé les gardiens.

Vous dénoncez les dérives humaines par des phrases choc et des images sublimes. D’où vient ce goût pour la provocation ?

De l’enfance certainement. J’étais réservé. L’art m’a permis de dire ce que je pensais sans avoir à ouvrir la bouche.

En février, à l’occasion du salon Lille Art Up !, vous avez dépassé cette timidité pour offrir à quelques privilégiés un hallucinant Live shooting show. Racontez-nous.

C’était une première mondiale. On a recréé le studio au Grand Palais de Lille. Mes assistants portaient des casques lumineux, les sept mannequins étaient impatientes, quatre cents spectateurs étaient présents, conscients de vivre un moment unique, d’entrer dans mon univers, mon intimité. 

Moi, je sentais leur énergie, leur adrénaline, c’était dingue. On avait préparé la séquence mais tout pouvait basculer à tout moment. C’était haletant. Le thème était bling-bling dinner, volontairement tape-à-l’œil, pour dénoncer l’overdose du luxe. Il y avait un fond noir, des strass Swarovski partout. J’ai aussi ajouté à la scène des accessoires amenés par les futurs acquéreurs. Le shooting a duré quarante minutes. 

À la fin, certains m’ont tendu leur bras pour que je les signe comme je le fais dans certaines photos. C’était vraiment intense, je suis rentré épuisé. Mais j’ai envie de recommencer, dans une salle plus grande.

Votre réputation est telle que les sept tirages numérotés de cette œuvre avaient été vendus AVANT que vous ne réalisiez la photo. Comment vivez-vous cette notoriété ?

Je n’ai jamais eu d’objectifs définis. Je suis arrivé à Saint-Tropez sans rien dans les poches. Aujourd’hui, je suis dans plusieurs galeries, j’ai participé à la prestigieuse Biennale de Venise, j’ai des expos dans des musées des beaux-arts. 

Alors, oui, mon parcours est quand même exceptionnel. Mais ce que je veux, c’est juste que ça continue, que j’aie toujours l’énergie, que j’avance à mon rythme, sans être happé par l’accélération. Le plaisir pour un artiste est de se sentir évoluer. Je ne veux pas sauter d’étapes, je veux monter les marches une à une, ne pas prendre l’ascenseur.

Vous venez à Biarritz en avril pour l’inauguration de PrestaArt Gallery. Que connaissez-vous de la Côte basque ?

J’adore ! J’ai un ami à Biarritz, David Brémond, qui tient le Blue Cargo avec sa sœur Sarah. Je me souviens de couchers de soleil dans ce lieu magique, le rocher de la Vierge, la baie de Saint-Jean-de-Luz, les vagues relaxantes de l’Atlantique.

Avez-vous foi en l’avenir de l’homme et de la planète ?

L’humain a pris conscience de l’urgence à protéger la nature, à radicalement changer les choses…, mais il mettra des générations et des générations à y parvenir. Je pense malheureusement que ce que l’on voit dans les films de science-fiction va arriver. C’est un sujet que j’ai abordé dans mes œuvres. 

Dans Future is now, j’ai mis en scène une déesse avec un masque à gaz protégeant dans ses mains le dernier arbre de la Terre. Ma sculpture Babies are hope représente un bébé qui tient un livre d’instructions pour sauver la planète. Bref. Le monde est compliqué. Mais il est beau aussi. Tant qu’on est en bonne santé, il faut profiter de chaque instant. Vivre le présent, sans retenue, et librement.

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