Côte Basque Madame N°41
© Charlotte Dalmont
Interview
4 septembre 2024
Donner le goût de l’écriture aux jeunes
Charlotte Dalmont
Journaliste et romancière passionnée d’enfance et de transmission, Delphine Saubaber a lancé il y a un an des ateliers d’écriture pour enfants, à Anglet. Elle propose aussi des ateliers pour adultes.
Journaliste, prix Albert-Londres, vous êtes ghostwriter pour des maisons d’édition et romancière. D’où vous vient ce goût pour l’écriture ?
Delphine Saubaber : Ma maman était professeure de français, il doit y avoir un amour des mots présent depuis toujours ! Originaire d’Agen, j’ai goûté au journalisme à Sud-Ouest où j’ai effectué un stage pendant Sciences Po. Cela m’a emportée. Le journalisme était l’alliance de la rencontre humaine et des mots. Aujourd’hui, j’essaie de véhiculer ma passion aux enfants et aux adultes.
L’an dernier, vous avez lancé des ateliers d’écriture pour les enfants de 6 à 10 ans, à Anglet. Comment a germé cette idée ?
D.S. : Ma fille était en CE1 et ne développait pas de goût pour l’écriture et la lecture, ce qui me causait du chagrin ! Au retour de vacances, on a commencé à ouvrir un cahier d’écriture créative. On a enchaîné les jeux et cela a planté quelque chose. Écrire est un acte très profond qui permet d’articuler sa pensée, de poser un regard sur soi-même, sur les autres, le monde… Les enfants viennent avec un cahier et des feutres. Je les fais aussi dessiner, ce qui soulage quand les mots ne viennent pas et les aide, visuellement, à prendre conscience de ce qu’ils écrivent, à être présents à ce qu’ils font. Je travaille ensuite toujours l’orthographe, avec eux, en expliquant que les mots sont vivants, que tout a un sens.
À l’heure du digital, en quoi est-ce important de susciter le goût de l’écriture chez les plus jeunes ?
D.S. : Cela me semble vital. Avec la comédienne et écrivaine Isabelle Carré, nous avons adressé une tribune à Gabriel Attal, alors ministre de l’Éducation, qui a été publiée à la rentrée 2024 dans Le Monde pour défendre la valeur profonde de l’écrit à l’école et en dehors, dans un monde « tout-écran » et bientôt « tout-IA ». Je connais des professeurs de collège qui corrigent les devoirs de ChatGPT tous les matins… Savoir écrire ne se réduit pas à aligner des phrases mais à donner du sens à ce que l’on écrit. Ce sens dont les enfants d’aujourd’hui, dans un monde violent, volatil, virtuel et illisible pour eux, ont tellement besoin.
Vous avez aussi créé des ateliers d’écriture pour adultes. À qui s’adressent-ils ?
D.S. : À tout le monde ! En général, ce sont des groupes de cinq à sept personnes, sur des séances mensuelles de trois heures, ou plus. Je les fais écrire puis on lit les textes. Le passage à l’oralité est un moment important. Ils posent le téléphone, pendant tout ce temps ! Une pause salutaire, dans une société axée sur la performance et l’image… Les ateliers sont des bulles, où l’on part de soi pour naviguer progressivement vers la fiction. J’y fais beaucoup appel aux sensations, aussi. C’est très inspirant de balayer ainsi tous les âges.
Quels sont les bienfaits de l’écriture ?
D.S. : L’écriture est une présence, elle nous rassemble, sert à inventer un monde intérieur, à laisser une trace, à se relier à soi-même et à l’Autre par les mots… C’est un espace-temps particulier. C’est très important de pouvoir nommer les choses, une clé pour trouver sa place dans le monde. Nous le savons tous, aussi : la violence, les fractures sociales se nourrissent de l’absence de mots, de pensée. Un enfant ou un adulte qui n’a pas les mots va vers la violence pour s’exprimer.
Y a-t-il des lieux au Pays basque qui vous inspirent ?
D.S. : Tout le Pays basque, qui est le lieu de mes racines paternelles ! J’aime particulièrement la montagne, la verticalité, le silence. Les pensées circulent, pendant la marche. L’écriture se nourrit de tout ce que l’on vit et de ce que l’on est.
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